vendredi 13 septembre 2013

Le crime farpait (L’amour est un crime parfait)

Adapté d’un roman de Philippe Djian, « Incidences » (2010), « L’amour est un crime parfait » est le huitième long-métrage des frères Larrieu. Et le quatrième dont le rôle principal a été confié à Mathieu Amalric. Filmé dans les Alpes suisses, il raconte comment un professeur de littérature à l’Université de Lausanne se retrouve suspecté d’avoir tué une de ses étudiantes, qui est aussi une de ses dernières conquêtes…


Cadre majestueux
La motivation profonde des frères Larrieu à faire du cinéma est de montrer la montagne à l’écran. On n’en doute pas un instant en admirant les magnifiques paysages enneigés qui sont le cadre de ce film noir. Ces montagnes, les frères Larrieu les filment beaucoup. Leur beauté et leur immensité est encore rehaussée par une très belle photographie qui accentue la blancheur des panoramas et renforce le contraste des images. Le but – réussi – étant de donner l’impression qu’une noirceur se cache derrière ces paysages immaculés.
« L’amour est un crime parfait » est en effet un film noir, ce que la loufoquerie douce des frères Larrieu ne tempère pas mais rend au contraire encore plus inquiétant. Ce qui n’empêche pas le film d’être aussi – et surtout – très drôle, grâce à ses acteurs : outre Mathieu Amalric, Denis Podalydès est hilarant dans le rôle du directeur du département littéraire de l’Université (l’Université de Lausanne, un étonnant bâtiment futuriste donnant des airs de science-fiction aux séquences qui s’y déroulent).

Faible polar
Images magnifiques, acteurs épatants, drôle, tordu : « L’amour est un crime parfait » aurait donc a priori tout pour plaire. Pourtant, le film semble curieusement passer à côté de son vrai sujet, la culpabilité. L’intrigue policière n’est en effet pas très bien traitée, et a semble-t-il moins intéressé les réalisateurs que leurs montagnes et leurs acteurs. L’ambigüité de l’histoire ne fera ainsi pas long feu - on se demande même si les réalisateurs ont vraiment essayé de ménager le coup de théâtre final, puisqu’on devine celui-ci bien à l’avance. Alors qu’ils ont réussi avec brio à incarner l’ambivalence dans leurs paysages, les réalisateurs échouent à en faire autant dans leur mise en scène. On voit beaucoup trop clair dans le jeu du personnage de Maïwenn, et si Mathieu Amalric est – comme d’habitude – parfait dans son rôle, le montage ne laisse guère de doute dans l’esprit des spectateurs.
Si « L’amour est un crime parfait » n’est pas entièrement abouti, il constitue néanmoins un très étonnant film policier, à la fois noir, saugrenu et alpin.

On retiendra…
Film noir au cadre et à l’image magnifiques, « L’amour est un crime parfait » excelle en tant que comédie tordue aux acteurs impeccables.

On oubliera…
Le film passe (volontairement ?) à côté de son sujet, une intrigue policière dont on devine les coups de théâtre à l’avance.

« L’amour est un crime parfait » d’Arnaud et Jean-Marie Larrieu, avec Mathieu Amalric, Karin Viard, Maïwenn, Denis Podalydès, Sara Forestier,…

Le Princess of Wales Theater

Une énorme salle, avec deux balcons...



... ainsi que des loges
De gauche à droite : les réalisateurs et leur traducteur
La première mondiale du film au Festival international du film de Toronto d’est déroulée en présence des deux réalisateurs… et de leur traducteur. « L’Amérique a les frères Coen, la Belgique les frères Dardenne. La France a les frères Larrieu » : ainsi se sont présentés avec humour Arnaud et Jean-Marie Larrieu.




La rencontre avec le public qui a suivi la projection, où les réalisateurs déclarèrent que ce qui les intéressait au cinéma était de filmer la montagne et ses habitants, a été marquée par l’intervention d’une canadienne francophone. Dans la salle immense du Princess of Wales Theater (comportant deux balcons !) et alors qu’ils expliquaient avoir trouvé dans le roman de Philippe Djian, dont le film est adapté, une histoire policière à raconter dans un cadre alpin, celle-ci a interrompu les réalisateurs en criant : « Djian n’appartient pas à la littérature française ! ». Il fallait oser.

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