vendredi 14 juin 2013

Le film d’après (After earth)

C’est l’un des réalisateurs les plus controversés d’Hollywood, à la carrière fascinante. M. Night Shyamalan conquiert les critiques et le box-office dès son deuxième film, « Sixième sens » (1999), grâce au procédé scénaristique du « twist final » qui assurera les succès de ses longs-métrages suivants (« Incassable », « Signes », « Le village »)... Un triomphe impressionnant qui donne à Shyamalan une liberté totale dont il finira peut-être par s’enivrer : de 2006 à 2010, « La jeune fille de l’eau », « Le dernier maître de l’air » et dans une moindre mesure « Phénomènes » sont des échecs publics et critiques retentissants. Le réalisateur semble depuis s’être enfermé dans une fuite en avant : bien qu’il essuie échec sur échec, les studios lui accordent des budgets de plus en plus conséquents…
On pourrait croire que son nouveau film « After earth », ne briserait pas cette suite malheureuse, avec son budget supérieur à 100 millions de dollars et son histoire imaginée par un autre grand mégalomane d’Hollywood, Will Smith. Or, il n’en est rien : si le film est (malheureusement) une nouvelle déroute au box-office, c’est indubitablement l’un des meilleurs du réalisateur.


Un retour éclatant
Pour la première fois, M. Night Shyamalan s’attaque au genre le plus spectaculaire de la science-fiction : le space opera. Tout comme le récent « Oblivion », « After earth » enthousiasme pour sa direction artistique et son scénario. Shyamalan nous plonge dans un futur inattendu et original : costumes et décors, d’apparence brute et naturelle, cachent leur sophistication. De même que le scénario, qu’on croirait aussi simple qu’un jeu-vidéo, se révèle être une suite quasi ininterrompue de bonnes idées. Dont celle, magnifique, de ces extra-terrestres devant susciter la peur de leur proie pour les repérer.
La référence au jeu-vidéo n’est pas anodine : M. Night Shyamalan livre ici un film à la narration aussi clairement inspirée de la progression jeu-vidéoludique que le scénario d’ « Inception » réutilisait la construction en niveaux des jeux-vidéos. Passé une exposition des plus dépaysantes et dérangeantes (grâce, on l’a déjà dit, à la formidable direction artistique), « After earth » annonce un récit en ligne droite dont on devine sans peine la conclusion sous forme de boss final. On redoute alors qu’une telle mise en scène soit une mauvaise manière de faire avancer le film… Or, celle-ci surprend finalement et convainc entièrement pour les surprises qu’elle parvient à susciter. En effet, il y a non seulement celles, programmées, des péripéties de cette quête, qui renouvellent à chaque instant le plaisir que l’on a à suivre cette histoire (et qu’on ne peut évidemment pas détailler pour ne pas gâcher la projection), mais aussi les écarts par rapport à cette ligne droite. C’est dans ces écarts que Shyamalan aborde le sujet de la quête identitaire qui irrigue tous ces films, tandis que la ligne droite reprend les préoccupations écologiques qui avaient été si décriées par la critiques dans « Phénomènes ». Et, jusqu’à la fin, on ne peut s’empêcher de se demander si le scénario s’achèvera ou non sur un twist final… Un suspense qui sera à jamais attaché à chaque nouveau film du réalisateur de « Sixième sens ».
Surtout, Shyamalan enthousiasme pour le merveilleux qu’il suscite. Comme Guillermo del Toro, le réalisateur fait partie de ces conteurs capables de réenchanter un imaginaire, ici celui du space opera. Au moment où tant d’autres échouent à s’affranchir de la pesanteur des références, comme Joseph Kosinski avec « Oblivion ». « After earth » est donc une très belle surprise, et l’une des plus belles réussites d’un réalisateur que l’on croyait pourtant perdu.

On retiendra…
Shyamalan est de retour avec une très belle fable de science-fiction.

On oubliera…
Les effets spéciaux numériques, qui étrangement pas toujours de très bonne facture.


« After earth » de M. Night Shyamalan, avec Jaden Smith, Will Smith,…

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