Dix-huitème film de Pedro Almodóvar, et quatrième en sélection officielle à Cannes, « La piel que habito » est malheureusement encore revenu bredouille du festival, faisant de l’espagnol le réalisateur maudit de Cannes. Mais pourtant, quel film ! Le chef-d’œuvre d’Almodóvar, sa plus grande œuvre à ce jour, une réussite extraordinaire.
On pensait pourtant Pedro Almodóvar perdu dans ses obsessions, répétant de film en film toujours les mêmes histoires d’amour tordues. « Les étreintes brisées », son film précédent, s’était révélé décevant, n’apportant rien de neuf à une filmographie déjà conséquente, si ce n’est un énième ressassement des thèmes fétiches et emblématiques du réalisateur espagnol le plus connu au monde, et ce alors même qu’Almodóvar avait promis du nouveau (avec une Pénélope Cruz « comme on ne l’avait encore jamais vu » – en fait, elle était juste blonde…). Qu’Almodóvar se répète est normal, il explore de film en film toujours plus profondément les thèmes qui lui sont chers et définissent maintenant toute son œuvre à un point tel qu’on reconnait instantanément un film du réalisateur. Mais il ne semblait plus avancer. Ce qui lui manquait, c’était du sang neuf, qu’il a trouvé dans le roman « Mygale » du français Thierry Jonquet. Et d’un coup, c’est un bond en avant, le film le plus magistral d’Almodovar.
Tous les thèmes d’Almodóvar se retrouvent donc une fois de plus dans « La piel que habito », mais sous une forme inédite, une histoire vicieuse de chirurgie science-fictionnelle qui traite principalement de l’identité. Tout est surprenant dans ce film, d’une originalité incroyable, audacieuse et complètement inattendue, ce qui est de plus en plus rare au cinéma et en particulier dans celui d’Almodóvar. Même si le réalisateur a déjà fait le tour de toutes les histoires d’amour extravagantes et d’inceste, celle-ci est racontée sous une forme neuve et qui s’intègre si parfaitement à l’univers coloré du réalisateur qu’il peut y déployer en profondeur tout son art.
Les couleurs sont toujours aussi vives, mais cette fois-ci une noirceur sourd de la magnifique photographie, instillant le malaise chez le spectateur. A l’image du visage d’Antonio Banderas, qui dès son apparition est déjà terriblement inquiétant. L’histoire est extraordinaire, impitoyable et met férocement mal à l’aise. On est manipulé avec bonheur et horreur, et on ressort de la projection avec le souvenir du film gravé à vif dans la mémoire. Le genre de film qui ne s’oublie pas et ne s’oubliera pas.
On retiendra…
Almodovar transcende ses thèmes grâce à une histoire ahurissante, surprenante, embarassante et plus que déconcertante.
« La piel que habito » de Pedro Almodóvar, avec Antonio Banderas, Elena Anaya, Marisa Paredes,…
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