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Deux distributeurs ont choisi de sortir à une
semaine d’intervalle deux films danois, pour bénéficier d’une meilleure
exposition médiatique autour de la figure de Mads Mikkelsen, acteur principal
des deux longs-métrages : « La chasse » de Thomas Vinterberg et « Royal
affair » de Nikolaj Arcel, deux excellents films récompensés cette année respectivement
à Cannes et à Berlin.
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Suzanne Bier, Nicolas Winding Refn, Thomas
Vinterberg : parmi les grands noms du cinéma danois, seul Lars von Trier n’a
pas encore tourné avec Mads Mikkelsen. Cet acteur exceptionnel, immédiatement
reconnaissable grâce à son visage si particulier, a enfin été reconnu cette
année à Cannes où il a obtenu le prix d’interprétation pour « La chasse ».
Acteur fétiche de Nicolas Winding Refn avant que celui-ci ne parte aux
Etats-Unis et ne le remplace par Ryan Gosling (« Drive », bientôt « Only
god forgives »), c’est sous sa direction qu’il a signé sa meilleure
performance à ce jour : impossible de l’oublier après avoir vu « Le
guerrier silencieux » (2010).
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Bon, comme je pense que nombre de lecteurs ne
voient toujours pas de qui nous parlons, je vais t’arrêter en citant ce qui est
malheureusement son rôle le plus célèbre : le Chiffre, le méchant de « Casino
Royale » (2006). Malheureusement parce qu’il a joué dans beaucoup d’autres
très bons films, dont les deux de cette semaine.
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Dans « La chasse », il incarne Lucas,
un éducateur travaillant dans un jardin d’enfants accusé de pédophilie. Le film
montre comment le personnage devient la proie du jour au lendemain de la
vindicte populaire, abandonné et harcelé par tous ses proches, sur la foi d’une
simple rumeur. La grande originalité de « La chasse » est que le
réalisateur ne laisse planer absolument aucun doute quant à l’innocence de
Lucas.
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Et oui, vous pouvez vous rassurer : on ne
vous a rien dévoilé de l’intrigue du film ! La certitude de l’innocence
apparaît comme très rafraîchissante, voire détonante pour un film d’auteur
puisque habituellement les réalisateurs laissent toujours planer le doute sur
les actions de leur personnage pour ne pas réduire le champ des interprétations
possibles de leur œuvre ! Ce qui est parfois exaspérant. « La chasse »
se révèle donc comme une étude sociologique des rapports humains, d’une très
forte intensité émotionnelle, puisque le spectateur s’identifie pleinement au
personnage de Lucas, la barrière du doute ôtée.
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C’est une des constantes des films danois: on n’en
ressort jamais indemne. C’est donc aussi le cas de « Royal affair », au
sujet complètement différent de « La chasse » : l’histoire vraie
du docteur Johann Struensee, qui réussit à imposer les idées des Lumières au
Danemark pendant un temps, vingt ans avant la Révolution française. Le film vaut
surtout pour son scénario, exceptionnel et pourtant bien adapté d’une réalité
historique ! Mais ici on ne vous en dira pas plus… L’autre atout majeur du
film est son interprétation, sauf qu’à Berlin ce n’est pas Mads Mikkelsen qui a
remporté le prix d’interprétation, mais Mikkel Boe Folsgaard, pour son interprétation
délirante mais extrêmement touchante du roi Christian VII.
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Et même si « Royal affair » souffre de
quelques imperfections (la représentation du peuple est complètement ratée, l’actrice
principale ne joue pas aussi bien que ses deux compagnons), on n’hésitera pas
un seul instant à vous le recommander, au même titre que « La chasse »
bien entendu !
On retiendra...
Les deux films sont parmi les
plus émouvants de l’année. Interprétation extraordinaire (pour n’en citer qu’une :
la scène de l’église dans « La chasse » !). Excellent scénario
pour « Royal affair ».
On oubliera…
Réalisation classique pour « Royal
affair » qui bute sur quelques écueils.
« La chasse » de
Thomas Vinterberg, avec Mads Mikkelsen, Thomas Bo Larssen,…
« Royal affair » de Nikolaj
Arcel, avec Mads Mikkelsen, Mikkel Boe Folsgaard, Alicia Vikander,…