lundi 30 janvier 2012

Ascendance (The descendants)


-          Penses-tu que Georges Clooney représente une menace sérieuse pour Jean Dujardin ?
-          Quoi ? Ils envisagent de remplacer Clooney par Dujardin dans les publicités Nespresso ?
-          Mais non. Ce sont les deux favoris pour l’Oscar du meilleur acteur.
-      Ah ! Ouais, Clooney est excellent dans son rôle, mais pas forcément meilleur que dans ses précédents films, comme « In the air ». De toute manière, ce n’est pas le sujet de cet article, consacré au film « The descendants ». Après le froid polaire de « Millénium », on ne pouvait rêver meilleure transition.
-       Ou plutôt absence de transition : c’est à Hawaï que se déroule le film. C’est de là que « The descendants » tire toute son originalité. Comme l’annonce la voix off de Clooney dès les premières minutes du film, vivre sur les îles paradisiaques hawaïennes ne vous exempte pas des douleurs encourues par les mortels du reste du monde. Le film ne lassera jamais le spectateur de l’opposition qu’il présente continuellement entre l’image stéréotypée que l’on se faisait de l’archipel et la tristesse de l’histoire. « The descendants » raconte en effet les difficultés auxquelles doit faire face Matt King, joué par Georges Clooney, suite à l’accident de hors-bord de sa femme, désormais dans le coma. Mais le cadre de cette histoire tout autant que le scénario du film ne cesseront de tempérer la gravité de cette intrigue, plaçant le film à la frontière du drame et de la comédie.
-      Visuellement, le décalage est immédiat entre la dureté du sujet et le décor du film : comment résister à cet archipel où tout le monde porte en permanence des chemises à fleur, quelles que soient les circonstances ? Mais cet arrière-plan complètement incongru pour un film de ce genre est en parfait raccord avec la tonalité générale du film. Outre le fait que la bande-son ne soit uniquement composée de musique locale, le réalisateur a le grand talent d’introduire même dans les scènes les plus difficiles des touches plus légères qui désamorcent tout pathos.
-          Si on excepte les trois plans du film où le réalisateur plonge entièrement dans le drame, en faisant brutalement advenir le silence notamment, les situations finissent toujours par basculer dans un registre plus léger. Parmi tous les personnages du film, il y en a même un résolument comique, qu’on croirait échappé d’un film humoristique.
-        En mêlant subtilement les genres, « The descendants » peut s’apprécier de manière complètement différente : on peut passer complètement à côté des allures comiques du film et n’y voir qu’une histoire de tragédie familiale pas forcément très originale, ce qui serait quand même dommage.
-      En revanche, d’autres aspects du film peuvent aussi s’avérer décevants : au-delà du scénario extrêmement prévisible, les personnages sont malheureusement tous très stéréotypés. On a ainsi affaire à l’adolescent ingrat, égoïste et tête à claque, mais qui se révèle par la suite avoir très bon fond, ou encore à la jeune fille mal élevée, mal éduquée, mais qui là encore saura révéler sa nature très positive lorsque les circonstances l’exigeront. Tout ceci a tendance à éloigner le spectateur du film, en rendant ce dernier artificiel et vain.

On retiendra…
Le balancement constant et très réussi du film entre la comédie et le drame, l’interprétation de Georges Clooney et… quoi d’autre sinon le cadre hawaïen du film ?

On oubliera…
Un peu moins de péripéties à la fin n’aurait pas nui à la crédibilité du film. Les caractères des personnages, tellement convenus.

« The descendants » d’Alexander Payne, avec Georges Clooney, Shailene Woodley,…

dimanche 15 janvier 2012

Déjà-vu (Millénium, les hommes qui n'aimaient pas les femmes)


-         Après avoir peut-être réalisé son meilleur film l’an dernier sur Mark Zuckerberg (« The social network »), David Fincher s’intéresse de nouveau pour son neuvième long-métrage à un autre personnage de geek à l’intelligence extraordinaire mais à la sociabilité difficile : Lisbeth Salander. Au côté du journaliste Mikael Blomkvist, elle est l’héroïne de la trilogie « Millénium » de Stieg Larsson.
-          Il ne pouvait y avoir de meilleur réalisateur que Fincher pour cette adaptation du premier tome de la saga littéraire suédoise ! Comme dans « Seven » et « Zodiac », il met encore une fois son immense talent au service d’une enquête policière très noire. Il suffit de voir la séquence introductive (précédant un magnifique générique) pour deviner que l’on est face à un film de Fincher : la photographie et la musique sont très semblables à celles de « The social network », ainsi que le montage.
-          Tu as parfaitement raison ! Après avoir déréglé le temps dans « L’étrange histoire de Benjamin Button », Fincher le met à l’épreuve : « Millénium » va (presque) aussi vite que « The social network ». Alors que dans ce dernier, le tempo accéléré du film entrait en résonance avec la rapidité du développement de Facebook et celle de réflexion de son créateur, ici ce rythme extraordinaire n’apparait plus que comme l’une des empreintes du réalisateur. Il parvient ainsi à traiter un scénario bien plus dense que celui de la première adaptation suédoise de la saga réalisée par Niels Arden Oplev, et ce alors que les deux films durent aussi longtemps. Peut-être ce rythme en déroutera certains, nous aurons du mal à l’évaluer étant donné que nous connaissions déjà l’histoire – grâce au livre et à l’adaptation suédoise.
-          La version suédoise est d’ailleurs un problème épineux au moment de rédiger cette chronique, car l’avoir vu influence beaucoup la perception de cette nouvelle adaptation. Le « Millénium » d’Oplev ne brillait pas par se mise en scène très convenue et peinait par moments à cacher son statut de téléfilm transporté sur grand écran, mais était quand même captivant grâce à son ambiance, la puissance de l’histoire imaginée par Stieg Larsson et l’interprétation de Noomi Rapace. Plus qu’une nouvelle adaptation, le « Millénium » de Fincher ressemble d’abord à un remake de ce film car on y retrouve la même atmosphère, quoiqu’en encore plus sombre. On pourrait d’ailleurs jouer au sept erreurs en comparant les deux films…
-          Mais ce serait totalement vain pour ceux qui ne l’ont pas vu, et qui se retrouveront peut-être face à un véritable choc devant le film de Fincher ! D’une formidable puissance visuelle, monté à un rythme hors du commun qui le rend passionnant de bout en bout, interprété par d’excellents acteurs et toujours aussi génialement accompagné par la musique de Trent Reznor et Atticus Ross, « Millénium » est un très grand film noir.

On retiendra…
La mise en scène de David Fincher, la vitesse de la narration et la formidable interprétation de Rooney Maara en Lisbeth Salander.

On oubliera…
Le film de Fincher a des allures de remake de la version suédoise. Il aurait fallu présenter une vision plus différenciée de l’histoire imaginée par Stieg Larsson… ou éviter de sortir le film moins de deux ans après la première adaptation.

A noter :
Daniel Craig et Rooney Maara ont signé pour la suite, à la sortie prévue fin 2013, avec ou sans Fincher derrière la caméra.

« Millénium, les hommes qui n’aimaient pas les femmes » de David Fincher, avec Daniel Craig, Rooney Maara,…

samedi 14 janvier 2012

Abritez-vous (Take shelter)


-          Tu les as entendus ?
-          Quoi ?
-          Les coups de tonnerre ! L’orage devait être tout proche…
-          Hum… J’étais sûrement trop absorbé dans mes révisions pour le remarquer. Rédiger cette chronique me changera peut-être les idées.
-          Avec de tels propos, tu ne peux que m’inquiéter… maintenant que nous avons vu « Take shelter », plus aucun coup de tonnerre ne me laissera indifférent.
-           Il est certain que l’année commence fort avec cet excellent film, mais je ne m’attendais pas à ce qu’il te dérange à ce point !
-          Il m’a autant dérangé qu’enthousiasmé : en réalisant son deuxième film seulement, le jeune Jeff Nichols s’impose comme un grand réalisateur. Dans ce long-métrage aussi poisseux que les heures précédents un orage d’été, le spectateur est plongé dans l’esprit de Curtis LaForche, un père de famille en proie à de telles visions apocalyptiques qu’il décide, dans l’incompréhension de ses proches, d’agrandir son refuge anti-tornade pour se protéger d’un danger qu’il est seul à ressentir.
-          La réussite du film tient à ses multiples interprétations, n’en proposant qu’une au départ pour en développer d’autres au fur et à mesure que le film avance, ce qui crée un suspense intense : Curtis est-il un prophète ou un fou ? L’originalité de la mise en scène est qu’elle ne cherche aucunement à faire naître la confusion dans l’esprit du spectateur entre ces deux interprétations. L’on sait parfaitement distinguer les rêves vaticinant de Curtis de la réalité. « Take shelter » ne multiplie pas les pistes de réflexion, il les superpose.
-          Le film réserve quelques grandes séquences très fortes émotionnellement, lorsque le spectateur partage les cauchemars de Curtis. Le temps d’une séquence, le montage use d’un procédé redoutablement efficace, en intercalant les images du rêve avec celles du réveil de Curtis, faisant craindre au spectateur qu’il n’en sortira jamais. D’ailleurs, le film entier marque durablement.
-          Malheureusement, je me dois de tempérer un peu ton enthousiasme à propos du film : sans vous dévoiler la fin, j’ai trouvé que « Take shelter » se terminait de manière trop attendue. J’en attendais peut-être trop de la part de ce film récompensé des grand prix de la Semaine de la Critique à Cannes et du festival de Deauville.
-          Mais le film ne pouvait pas se terminer autrement !
-          C’est bien là le problème : on sait déjà à quoi s’attendre avant de l’avoir vue. On est en droit d’attendre un peu plus de nouveauté. La froide certitude d’une fin du monde dans « Melancholia » était décidément bien rafraîchissante.

On retiendra…
L’interprétation de Michael Shannon qui porte tout le film sur ses épaules, la mise en scène de Jeff Nichols.

On oubliera…
Un regret : la fin n’est pas aussi originale que ce qui précédait.

« Take shelter » de Jeff Nichols, avec Michael Shannon, Jessica Chastain,…

mardi 10 janvier 2012

Les 11 films qu’il fallait voir en 2011

-          Tu y es peut-être allé un peu fort cette fois-ci avec le titre de l’article, non ?
-          Faire le classement des meilleurs films de l’année étant de toute manière un exercice totalement arbitraire - plus encore qu’attribuer une note à un film - et sans aucune légitimité, je n’ai donc aucune raison de modérer le titre de ce classement 2011.

1 Black Swan

2 The artist

3 Essential killing

4 Drive

5 Melancholia

6 Somewhere

7 La piel que habito

8 Pater

9 The tree of life

10 L'ordre et la morale

11 La dernière piste

-          Je n’ai qu’une déception pour 2011 : il y a un film que nous n’avons pas pu voir, « Le cheval de Turin » de Béla Tarr, qui a été très peu diffusé à Toulouse. Mais on en reparlera lorsqu’il sortira en DVD.
-          D’après notre classement commun, il n’y aura pas eu de découverte surprise en 2011, les réalisateurs des films de ce classement étant tous déjà renommés, ou presque en ce qui concerne Jerzy Skolimowski, qui a été redécouvert grâce à l’impressionnant « Essential killing ». Et si ces réalisateurs ont signé leur chef-d’œuvre en 2011, on espère qu’ils arriveront à faire encore mieux plus tard, en particulier Nicolas Winding Refn (« Drive ») !
-          Maintenant, puisque tu ne veux pas que l’on se hasarde à citer les films les plus prometteurs de 2012, que nous reste-t-il à dire ? Il est temps de passer aux bonnes résolutions.
-          Ma résolution pour la nouvelle année sera d’une minute d’arc, ça devrait convenir à ma vue pour apprécier correctement les films de cette année 2012 !