samedi 4 août 2012

Péplum argentin (Elefante blanco)

Pablo Trapero porte, avec Juan José Campanella, un cinéma argentin de genre talentueux, spectaculaire de maîtrise, et surtout fortement ancré localement. « Carancho » l’an dernier m’avait fortement marqué. Son nouveau film, « Elefante blanco » (Un certain regard à Cannes), quoique moins réussi que le précédent, n’en reste pas moins prodigieux. Déjà sorti en Espagne, il devrait sous peu arriver dans les salles françaises.


Darín, Gusman et…
Chaque film de Pablo Trapero explore des facettes de la société argentine, partant de l’ordinaire pour aller jusqu’à l’extrême, à l’image de l’escalade poussée jusqu’à l’absurde des accidents de voiture dans « Carancho ». Et pourtant, cela sonne toujours juste car le ton est grave, et c’est ce qu’il y a de plus extraordinaire dans ses films.
Dans « Elefante blanco », Trapero s’attaque « au plus grand hôpital d’Amérique latine », gigantesque bâtisse entourée de bidonvilles en construction depuis quarante ans. Et, surprise au casting, aux côtés de Ricardo Darín et Martina Gusman, se trouve… Jérémie Renier. Qui s’en sort très bien, et ne fait pas tache au milieu de tout ces acteurs argentins - et heureusement, car il incarne le personnage principal du film, que l’on découvre méconnaissable dans une scène introductive très spectaculaire.

Réalisme
Trapero continue de déployer sa mise en scène au travers de longs plans-séquence, qui, pour peu qu’on y fasse attention, ne peuvent manquer d’impressionner. L’intérêt de ces plans-séquence est un immédiat effet de réel, la caméra suivant les personnages au travers du dédale des bidonvilles ou de l´hôpital à la construction arrêtée. Ces décors du film - la carcasse de l’hôpital qui écrase les constructions branlantes des baraquements qui ont poussé autour de lui, et le nombre de figurants – notamment lors des affrontements entre police et habitants - sont très impressionnants, d’autant plus que l’on devine immédiatement qu’il ne s’agit ni de décors de cinéma, ni d’acteurs professionnels, sinon les habitants et leur quartier. Trapero peut ensuite développer son histoire, sans craindre de perdre cet effet de réel face à une situation trop horrible, et que le spectateur décroche en se disant que le film verse dans la surenchère. Il réussit aussi à provoquer de brusques ruptures de ton, surprenantes, et qui font écho aux ruptures du montage, sautant de plans-séquences en plan fixes, ou à celles de la très belle musique de Michael Nyman.
L’intensité de l’ensemble tire une fois de plus le film vers une grande émotion. Mais le réalisateur ne poussera pas son histoire jusqu’à la quasi absurdité de « Carancho » - parce que le sujet ne s’y prêtait pas, qu’il s’agit ici de raconter la naissance d’une vocation. Mais du coup, j’ai trouvé son film précédent plus puissant encore que celui-ci, qui a pour lui une plus grande ampleur. « Elefante blanco » est, par bien des aspects, le premier péplum de Trapero.

On retiendra…
La méthode Trapero, toujours aussi efficace et poignante, dans son film le plus ample.

On oubliera…
La méthode Trapero évolue – la présence d’un acteur belge au casting lui apporte un peu de fraîcheur - mais se renouvellera-t-elle ?

« Elefante blanco » de Pablo Trapero, avec Jérémie Renier, Ricardo Darín, Martina Gusman,…

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