samedi 14 mai 2016

Woody Allen : what else ? (Café society)

Qu’a donc de particulier le Woody Allen millésime 2016, « Café society » ? Qu’il ouvre le 69ème festival de Cannes ? Pas vraiment : c’est la troisième fois que l’une des œuvres du réalisateur donne le coup d’envoi des projections à Cannes (pour l’ouverture d’un festival de cinéma, Woody Allen est peut-être la seule et unique valeur refuge). On citera donc plutôt le changement de chef opérateur : Darius Khondji a laissé place à Vittorio Storaro. Un remplacement qui peut paraître anecdotique – et en effet, Storaro reproduit des ambiances et des lumières très similaires à celles de Khondji – mais a en fait son importance. S’il y a en effet une chose qui surprend un peu dans ce nouveau film de Woody Allen, ce sont les mouvements de caméra, plus nombreux qu’à l’ordinaire (l’ordinaire consistant surtout en plans fixes). Faut-il voir, derrière ce champ inhabituellement mobile, les prémisses d’une future évolution de la réalisation de Woody Allen ? On le saura l’année prochaine.


Problématique constance
Pour le reste, « Café society » déroule, sur une histoire de triangle amoureux, un programme assez convenu, parfois même un peu ennuyeux – ce film-ci est un peu moins drôle que la moyenne. Il y a certes une nouvelle venue, Kristen Stewart, mais elle s’est si bien intégrée à l’univers du cinéaste qu’elle ne fait rien déborder de ce qui, pour le spectateur, ressemble à une routine. Une routine évidemment plutôt virtuose… mais toutes les qualités du film (interprétations impeccables, lumière magnifique, coups de théâtre habilement ménagés) ne sauront pas faire départir le sentiment de déjà-vu qui imprègne l’œuvre, et diminue grandement l’émotion qu’il entendait susciter. La dernière partie du film, sur les années enfuies, le passé perdu et les regrets de jeunesse, vise à la mélancolie, mais la force de ce sentiment est diminuée par l’absence manifeste de toute trace de passage du temps sur les visages des acteurs Jesse Eisenberg et Kristen Stewart, qui restent éternellement jeunes. C’est peut-être le seul défaut de réalisation du film (récurrent dans le cinéma de Woody Allen) mais il n’y a rien, de l’autre côté de la balance, rien qui puisse motiver un quelconque enthousiasme.
« Café society » n’est donc pas un événement dans la filmographie décidément trop constante du cinéaste new-yorkais. Mais il annonce quand même une possible évolution de la manière de filmer du cinéaste – évolution que l’on sera donc curieux d’observer.

On retiendra…
La virtuosité habituelle du cinéaste, qui filme ici avec une caméra plus mobile qu’à l’ordinaire.

On oubliera…
La virtuosité habituelle du cinéaste, qui, délivrée chaque année, et ce depuis quarante ans, peut aujourd’hui ennuyer.


« Café society » de Woody Allen, avec Jesse Eisenberg, Kristen Stewart, Steve Carrell,…

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