jeudi 8 août 2019

Camping (Midsommar)



Pourquoi être allé le voir ?
Dans un été hollywoodien complètement creux, ce film indépendant était la plus belle promesse de frissons. Il s’agit du deuxième long-métrage d’Ari Aster dont le premier, déjà étiqueté « film d’horreur », avait pas mal fait parler de lui (« Hérédité »).

Pourquoi le voir ?
Un film d’horreur aussi bien mis en scène, aussi original et prenant, aussi inquiétant, ça n’était pas arrivé depuis bien longtemps ! Le réalisateur commence par brouiller les pistes sur le sujet réel de son histoire : on craint d’abord d’avoir affaire avec une intrigue psychologique à base de traumas refoulés, puis d’un film de défonce façon « Climax », jusqu’à ce que les personnages et l’intrigue s’installent à Hårga, une communauté enclavée dans la nature suédoise. Le mystère de ce que sera le sujet du film est alors entier – jusqu’à un premier choc narratif, inouï, qui laissera encore sonné le spectateur pendant encore un bon moment avant qu’il ne comprenne que les clés du film sont à sa portée… Le film mériterait d’être vu rien que pour cette scène, tant elle est impressionnante !
« Midsommar » est fort, très fort, et est remarquablement bien filmé – la mise en scène rappelle d’ailleurs par bien des aspects celle de Stanley Kubrick, le modèle indépassable. Les acteurs sont tous excellents et Florence Pugh, qui interprète le personnage principal, fascinante. Jouer du contraste entre l’innocence apparente de cette communauté (avec l'idée géniale du décor de l'été suédois, durant lequel le soleil ne se couche presque jamais) et l’horreur qu’elle couve pour inspirer l'effroi – ce principe du film peut sembler simple mais il s’avère fonctionner à plein et être bien plus puissant et profond qu’imaginé de prime abord.

Pourquoi ne pas le voir ?
Pendant les trois premiers quarts du film, le réalisateur a au moins un coup d’avance sur ses spectateurs. Mais vers la fin du film (à un moment qui doit varier selon les spectateurs), la conclusion du film se fait deviner et le film se fait alors assez lourd voire lassant. La mise en scène toujours très travaillé, que l'on trouvait avant géniale, se met à frôler la sophistication inutile et la prétention.

On retiendra…
L’horreur en plein jour et en plein soleil. Les surprises du scénario. La mise en scène, impressionnante de puissance.

On oubliera…
Le film ne résiste pas complètement au dévoilement de son mystère. La fin ambigüe.

« Midsommar » d’Ari Aster, avec Florence Pugh, Jack Reynor,…

samedi 3 août 2019

La nuit la plus longue (Halte)


Pourquoi être allé le voir ?
Un film de science-fiction philippin en noir et blanc durant 4h39 ? Rares sont les films à autant interpeller ! Il s’agit du premier film que je vois du cinéaste philippin Lav Diaz. Tous les cinéphiles connaissent de nom ce réalisateur grâce aux prix qu’il remporte (un Léopard d’or et un Lion d’or, en 2014 et 2016), mais bien peu connaissent réellement son œuvre du fait de la durée extravagante de ses longs-métrages : de 3h30 pour le plus court à… 11h pour le plus long.

Pourquoi le voir ?
Le cinéaste raconte l’oppression et la résistance sous un régime dictatorial (faisant bien évidemment écho à toutes les dictatures, passées, présentes et  à venir) avec des moyens qui se rapprochent de ceux du documentaire. Il ne cherche pas à dramatiser sa narration. De fait, malgré sa durée hors norme, « Halte » n’a rien de colossal ou de prétentieux. Il s’agit d’un film modeste, tant dans ses moyens que dans sa narration. Il est admirable qu’avec si peu, Lav Diaz puisse en raconter autant : pour décrire ce futur, il lui suffit de tourner de nuit et de faire voler quelques drones. Ce plaisir de fabrication du film est ressenti par le spectateur.
Ça ne peut pas se deviner au premier abord, mais le film est aussi empreint d’humour, à travers notamment le personnage du dictateur, qui pourrait être une référence au film de Chaplin, ou les us et coutumes très étranges de ses adorateurs.
Et puis on peut aller voir « Halte » pour apprécier pleinement l’ironie de son titre (on imaginerait bien Quentin Dupieux réaliser un film de 5 heures intitulé « Bref »).

Pourquoi ne pas le voir ?
« Halte » permet de se rendre compte que les souvenirs laissés par un film ne sont pas forcément proportionnels à leur durée – la faute aux inévitables moments de somnolence... Le film est en fait assez difficile à suivre, à cause de ses multiples personnages et de sa narration très brute qui ne fait rien pour aider son spectateur dans sa compréhension de l'histoire. Evidemment, le film ne fait rien non plus pour le réveiller, car il n’y a pas de suspense, pas de moments de tensions, de climax : « Halte » n'a rien d'haletant. De fait, on se demande quand même à l’arrivée du générique de fin pourquoi est-ce que ce film devait durer aussi longtemps…

On retiendra…
La modestie de cette chronique de la vie sous une dictature futuriste. C’est original, impressionnant par l’économie de ses effets, et même drôle.

On oubliera…
Le film n’est pas toujours bien compréhensible, et sa durée conséquente ne semble pas justifiée.

« Halte » de Lav Diaz, avec Joel Lamangan, Piolo Pascual,…