Entre les
jeux-vidéo et le cinéma, les liaisons sont nombreuses mais jamais fructueuses.
Les jeux-vidéo adaptés de films comme les films adaptés de jeux-vidéo sont très
souvent des déceptions, voire des ratés sans nom. Ce « genre » cinématographique
de l’adaptation du jeu-vidéo attend toujours son chef-d’œuvre (ou, pour être
moins ambitieux, son premier très bon film). A l’annonce de l’adaptation de
l’univers jeu-vidéoludique « Warcraft » sur grand écran, la méfiance
était donc de mise. A l’annonce que le projet était confié à Duncan Jones, le
réalisateur novice mais prometteur de l’inspiré « Moon », l’espoir a
succédé à la méfiance.
Dialogues ridicules
Espoir qui
a été déçu dès les premières minutes du film. La première scène (un dialogue
entre un père et une mère orc) annonce la couleur : les dialogues sont
consternants. C’est qu’ils ont une lourde mission : l’exposition des
personnages comme l’explication de l’univers de « Warcraft » sont
censés passer par ces dialogues. Ce qui donne des dialogues ou abscons (plein
de termes propres à l’univers de « Warcraft » que le néophyte ne
comprend pas) ou totalement antinaturels (lorsqu’on sent qu’un personnage
s’adresse moins à ses interlocuteurs qu’au spectateur). Dans les deux cas, on
sourit devant tant de maladresse…
Exposer un
univers n’est jamais un problème simple. Louable intention : Duncan Jones a
voulu plonger ses spectateurs dans l’action dès le départ – l’invasion commence
ainsi dès le début du film – en leur livrant les clés de compréhension de
l’histoire au fur et à mesure de son déroulement. Le tout sans céder à la
facilité qu’est la voix-off s’adressant aux spectateurs. Dommage pour lui, l’histoire
qu’il doit raconter n’est pas une quête initiatique, et il n’a pas assez
confiance en sa mise en scène pour que celle-ci délivre des clés à la place des
dialogues. Ou, plus vraisemblablement, les producteurs n’ont pas permis à
Duncan Jones de faire jouer l’intelligence de ces spectateurs, lui qui a
réalisé deux films, « Moon » et « Source code », reposant
sur un mystère à résoudre par les spectateurs.
Visuellement ridicule
S’il n’y a
rien à écouter (la musique n’étant pas plus inspirée que les dialogues, sans
être pour autant déshonorable), qu’y a-t-il à regarder ? Là encore, il
faut se retenir pour ne pas noircir le tableau. Louable intention (bis) :
la direction artistique s’inspire de celle du jeu-vidéo, qui visuellement
tirait vers le cartoon. Sauf que ce choix n’est pas du tout au diapason de la
mise en scène du film, qui ne décroche qu’à de rares moments du premier degré,
et n’a donc pas la fantaisie qui s’exprime dans les costumes et les décors. Ce
décalage a des effets ridicules, comme ces armes et armures qui sont, comme
dans le jeu, surdimensionnées, mais portées sans effort supplémentaire eut
égard à leur poids par les acteurs du film.
Le film ne lutte pas non plus avec
suffisamment de conviction contre sa parenté avec « Le seigneur des
anneaux ». Pour faire court, l’impression générale en
regardant « Warcraft » est celle d’un sous-« Seigneur des
anneaux » : tout ce que le film montre a déjà été vu, en beaucoup
mieux, dans la trilogie de Peter Jackson. La comparaison est fatale.
Avec de
tels défauts, il ne reste plus qu’une chose qui puisse redresser le niveau du film :
ses acteurs. Las ! Il n’y aura aucun secours à chercher de ce côté-là,
aucun des acteurs du casting ne réussissant à exprimer une émotion complexe. Le
ridicule règne, du capitaine de l’armée qui, par un mystère qu’on n’explique
pas, ressemble physiquement à DiCaprio dans « The revenant » – mais
sans que l’interprétation hallucinée ne suivre) au couple royal aussi
charismatique qu’une motte de beurre fondue. Le comble du ridicule est atteint
lors de l’intrigue sentimentale (heureusement peu mise en avant) entre le
capitaine de l’armée humaine et la femme demi-orc.
Un potentiel mal exploité
Il y a bien quelques atouts (en-dehors de ce que j’ai
dit sur le visuel, la photographie est très belle, le scénario ménage une
péripétie à la fin dramatiquement très forte, les effets spéciaux savent
impressionner, le scénario aborde des thématiques intelligentes), mais quand on
fait les comptes, il n’y a quand même pas grand-chose à sauver de ce
« Warcraft : le commencement ». Pour nous achever, comme son
titre l’indique, le film n’est que « le commencement » de l’histoire,
et n’a donc pas de fin : la mode des blockbusters se voulant épisodes de
saga au long cours est de plus en plus répandue et frustrante.
Pour
terminer sur une note plus positive, on sent quand même derrière « Warcraft :
le commencement » le potentiel pour faire un bien meilleur film. Si des
choix artistiques plus audacieux et cohérents étaient pris dans l’éventuelle
suite, la malédiction des adaptations de jeux-vidéo au cinéma pourrait enfin
prendre fin. Ce qui fait que l’on est malgré tout curieux de voir une suite.
On retiendra…
Spectaculaire. La photographie,
lumineuse.
On oubliera…
Un ridicule (plus ou moins
léger) qui s’exprime aussi bien dans les dialogues que dans la direction artistique.
L’impression permanente de voir un sous-« Seigneur des anneaux ».
« Warcraft : le
commencement » de Duncan Jones, avec Travis Fimmel, Paula Patton, Toby
Kebbell,…
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