Avec
« Bande de filles », Céline Sciamma ne réalise que son troisième
film, mais sa notoriété est déjà immense grâce au succès critique de son
deuxième film, « Tomboy ». Sorti en salles en 2011, sa diffusion télé
sur Arte début 2014 avait suscité une polémique en pleine période de psychose
sur la théorie du genre, polémique complètement absurde mais qui avait
contribué à élargir considérablement le public du long-métrage.
Ambition louable…
« Bande de filles » est un projet plus
ambitieux que le minimaliste « Tomboy » : faire naître à l’écran
des personnages inédits au cinéma français, issus de territoires largement
inexploités par la fiction. Entièrement écrit par Céline Sciamma, « Bande
de filles » raconte l’histoire de Marieme. En situation d’échec scolaire,
maltraitée par son frère dans un environnement très machiste, elle trouvera une
nouvelle direction à sa vie à l’âge de tous les possibles en étant accueilli
par l’attachante « bande de filles » du titre qui la renommera Vic.
Ce n’est pour elle que la première étape de son passage à l’âge adulte…
L’adolescence,
l’environnement morne des cités, le choix d’une identité : le cinéma de
Sciamma a déjà trouvé des thèmes de travail. La mise en scène de Céline Sciamma
est toujours aussi distinguée et réfléchie : une volonté de réalisme et
d’immersion qui n’est pas portée par des plans prise caméra à l’épaule mais par
des plans fixes, composés, électrisés par la superbe musique de Para One. Malgré
le sujet déjà fort rebattu, c’est une vraie découverte que propose la
réalisatrice, dont l’intention de bousculer les représentations dans le cinéma
français est aussi efficace que salutaire. Le quatuor d’actrices, recruté suite
à un casting « sauvage », s’empare de leur premier rôle avec énergie.
…pour un résultat bancal
Mais la
vision de « Bande de filles » provoque un léger malaise. Quelque
chose cloche dans ce film, qui sonne parfois faux. Il y a un problème de
distance entre Céline Sciamma et l’objet de sa mise en scène. Une ambigüité
dans la démarche de l’auteur qui n’est pas dépassée par la puissance de son
sujet : la faute peut-être à cette histoire volontairement classique, dont
la construction trop étudiée fait parfois voler en éclats l’impression de
réalisme pourtant recherchée. Le film réserve de beaux moments, comme le fameux
play-back sur « Diamonds in the sky » de Rihanna, mais est trop cadré.
L’émotion n’affleure finalement qu’à peu de moments. « Bande de
filles » fait partie de ces films finalement plus remarquable pour leur
ambition que pour eux-mêmes. De ces films qu’on aimerait aimer, sans y parvenir
complètement…
On retiendra…
L’ambition accomplie de ce
projet : agrandir le répertoire fictionnel du cinéma naturaliste français.
On oubliera…
Céline Sciamma n’a pas su
trouver la bonne distance pour filmer cette histoire.
« Bande de filles »
de Céline Sciamma, avec Karidja Touré, Assa Sylla, Lyndsay Karamoh, Mariétou
Touré,…
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