lundi 18 juin 2012

Grrrimm ! (Blanche-Neige et Blanche-Neige et le chasseur)


L’adaptation de contes est à la mode à Hollywood. Ceux-ci étant libres de droit, chaque studio y va de son adaptation. C’est ainsi que deux films adaptés du conte des frères Grimm « Blanche-Neige » sont sortis au cinéma en 2012, avant l’arrivée prochaine de « Hansel et Gretel », « La belle et la bête » ou encore « La belle au bois dormant ». Le premier, sorti en avril, est « Blanche-Neige » (« Mirror, mirror » en VO) de Tarsem Singh. Le deuxième, « Blanche-Neige et le chasseur », sorti en juin, est réalisé par Rupert Sanders. Au milieu des remakes/reboots/prequels, une telle répétition ne choque même plus. L’an dernier, on s’était bien amusé de la sortie quasi-simultanée des deux adaptations de « La guerre des boutons » en France. Et quand on compte le nombre d’adaptations de « Dracula » en préparation à Hollywood…


La confrontation entre les deux long-métrages est très inégale. La réalisation de Tarsem Singh m’avait déjà ébloui dans « Les immortels », son précédent long-métrage, et l’on retrouve dans « Blanche-Neige » la même maîtrise visuelle et une direction artistique atypique, onirique et ambitieuse. « Blanche-Neige et le chasseur » est lui un des pires blockbusters de l’année, doté des plus mauvais dialogues que l’on ait entendu depuis longtemps. Rupert Sanders va beaucoup trop vite et échoue totalement à donner vie et consistance à ses personnages, brossés à trop gros traits et maladroitement interprétés… Son film manque lamentablement de souffle.

La pomme
S’éloigner du conte originel et du film concurrent a été le credo des deux équipes de scénaristes. Tandis que l’oeuvre de Tarsem Singh est une très divertissante comédie, agréable et superficielle, « Blanche-Neige et le chasseur » lorgne vers l’heroic fantasy et se veut sombre et épique sans y parvenir du tout. La figure du prince charmant présentée par les deux films permet de bien saisir leurs différences : dans « Blanche-Neige », il s’agit d’un ingénu qui avalera au cours du film un philtre d’amour pour chien, alors que dans le film de Rupert Sanders, c’est un chasseur veuf qui noie son chagrin dans l’alcool.
Les deux films se rapprochent curieusement sur l’adaptation du passage le plus emblématique du conte, le moment où la sorcière propose une pomme empoisonnée à Blanche-Neige : cette scène est rejetée au second plan dans les deux long-métrages. Elle a dû embêter les scénaristes, puisqu’aucune des deux intrigues ne s’y attarde : la pomme est reléguée à l’épilogue dans le film de Singh, et accessoire interchangeable dans le film de Sanders.

La Reine
C’est la seule réussite du film « Blanche-Neige et le chasseur » : les métamorphoses subies par la Reine sont plutôt impressionnantes. Qu’elle demande conseil à son miroir magique ou qu’elle se transforme en une nuée de corbeaux, qu’elle vieillisse puis rajeunisse de trente ans en quelques minutes, la Reine est le seul personnage qui atteint la dimension épique que cherchait désespérément le réalisateur, par la grâce des effets spéciaux. Rupert Sanders vient de la pub, et cela se remarque. Son film n’est qu’une succession de scènes-clips grossièrement et rapidement reliés. Mais paradoxalement cette empreinte publicitaire convient bien aux apparitions de la Reine, surtout lorsque celle qui l’interprète est notoirement connue comme égérie de Dior…
La position de la Reine dans le film de Tarsem Singh est symétriquement inversée : c’est le seul personnage qui ne convainc pas. Julia Roberts n’est jamais drôle dans son rôle, et devient rapidement irritante. Etrange que le réalisateur ait buté contre cette figure, si importante dans le conte, alors que tous les autres personnages sont admirablement bien rendus.

Les nains
                Ils sont incontournables. Et irrésistibles dans « Blanche-Neige ». La direction artistique étonnante qui marque les films de Tarsem Singh les a transformés en géants dans une des idées les plus fabuleuses du film.
                Dans « Blanche-Neige et le chasseur », ils gardent leur côté pittoresque mais à l’image du film ils sont trop pompeux. En particulier le plus vieux d’entre eux, une sorte de prophète reconnaissant le messie en Blanche-Neige, au point qu’il en devient involontairement comique.

Blanche-Neige
                Surprise : Lily Collins incarne parfaitement la Blanche-Neige du film de Tarsem Singh. On tombe sous le charme de sa fraîcheur et l'actrice vole aisément la vedette à Julia Roberts. Kristen Stewart n’est qu’un pâle pantin dans le film de Rupert Sanders. Lorsqu’elle a dû se rendre compte que le réalisateur n’allait pas lui permettre de faire exister son personnage, comme celui de tous les autres acteurs, à cause de la rapidité du scénario, on a l’impression qu’elle s’est complètement effacée, ânonnant sans conviction les ridicules répliques écrites par les scénaristes en panne totale d’inspiration. Chris Hemsworth a choisi la voie inverse : il surjoue le chasseur barbare et son cabotinage insupportable éclipse un peu la médiocrité de sa partenaire.

La chanson finale
Et oui, les deux films s’achèvent par un clip ! Comme dans un film de Bollywood, « Blanche-Neige » a le droit à une chorégraphie finale qui convient parfaitement à l’esprit du film. La chanson interprétée par Lily Collins fait une excellente surprise finale et m’a étrangement beaucoup plu. Ce qui n’est pas du tout le cas de celle de Florence + The Machine à la fin de « Blanche-Neige et le chasseur ». Un jugement qui tient peut-être aux qualités respectives des deux films.

On retiendra…
La réalisation toujours aussi étonnante de Tarsem Singh, accompagnée d’une direction artistique audacieuse. Les maléfices de la Reine dans le film de Rupert Sanders.

On oubliera…
Les dialogues et la réalisation du film de Rupert Sanders, ainsi que l’interprétation générale des acteurs. Alors que seule Julia Roberts est agaçante dans le film de Tarsem Singh.

« Blanche-Neige » de Tarsem Singh, avec Lily Collins, Julia Roberts,…
« Blanche-Neige et le chasseur », avec Kristen Stewart, Charlize Theron,…

2 commentaires:

  1. Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.

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  2. Tout à fait d'accord ! (en tout cas pour l'analyse du film de Rupert Sanders. Je suis allé le voir lundi soir et j'en reste très très très désappointé. J'avais espéré que l'héroic fantasy et un bon scénario rendrait le jeu Kristen Stewart (alias Twilight) et Chris Hemsworth (alias Thor), deux acteurs dont je n’apprécie pas du tout le jeu (pas de sourire pour Kristen, aucune expression ; un jeu bourrin et inintelligent pour Chris).
    A la fin du film, on aurait eu envie que la reine gagne tant l'actrice joue à la perfection...

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