Cet été
2012 s’avère exceptionnel. Après le choc de « Faust », un autre film
se propulse dans la constellation - pour le moment réduite - des films
marquants de l’année. Avec « Holy
motors », Leos Carax signe le meilleur du cinéma français depuis la Palme
d’or d’ « Entre les murs ». Pourquoi « Holy motors » n’a-t-il
pas remporté la Palme d’or cette année, ni aucun autre prix, c’est un mystère
que l’on tentera de résoudre lors de la sortie à la rentrée des films primés de
la sélection officielle. On ne peut même plus expliquer l’attribution du prix
du jury au dernier film très mineur de Ken Loach, « La part des anges »,
pour sa qualité de seule comédie au milieu d’une sélection officielle très
funèbre. « Holy motors » est en effet mille fois plus drôle. C’est
même le film le plus drôle de l’année. Mais aussi le plus mélancolique. Le plus
beau. Le mieux interprété. Le plus bizarre. En un mot, le meilleur.
Avertissement
A quelques exceptions près, il vaut toujours mieux ne
rien savoir d’un film avant de le regarder, pour ne pas diminuer la surprise de
sa projection. C’est pourquoi j’enjoins tout lecteur de cet article n’ayant pas
encore vu le film à quitter toute affaire cessante cette page, pour se rendre
illico au cinéma voir « Holy motors ». Les autres peuvent continuer
leur lecture.
Le cinéma incarné en un film
Leos Carax n’avait pas tourné de longs-métrages
depuis treize ans. D’où peut-être la multiplicité des « rendez-vous » de
Monsieur Oscar (plus ou moins neuf), chacun étant presqu’un film à lui tout seul. Ainsi, avec une
seule œuvre, Leos Carax raconte beaucoup plus que certains réalisateurs en dix
films. Pourtant, « Holy motors » n’est absolument pas un film à
sketchs, car il n’y a pas d’interruptions entre les rendez-vous, sinon un retour
à la limousine blanche – que l’on croirait avoir déjà vue dans « Cosmopolis »
de Cronenberg – où Denis Lavant entame la transition d’un personnage à un
autre.
Cette structure géniale permet au réalisateur d’évoquer
aussi bien l’ensemble de sa filmographie que toute l’histoire du cinéma (y compris son futur !), et de
tracer un formidable portrait du métier d’acteur. Tous les « rendez-vous »
sont exceptionnels. Mais s’il fallait n’en choisir qu’un, je citerai la
séquence en motion capture – pour avoir réintroduit de la poésie dans le cadre extrêmement
appauvrissant du tournage sur fond vert -, la rencontre de Monsieur Merde avec
Eva Mendes – pour la folie joyeuse de cette créature, la plus belle création du
duo Lavant-Carax -, l’entracte dans l’église – un plan-séquence exclusivement
musical magnifiquement réalisé -... Mais n'avais-je pas dit "un" rendez-vous ? Tous pourraient être cités et également loués.
Identité(s) ?
Identité(s) ?
Sans oublier la formidable introduction qui annonce
la poésie de la suite, où le réalisateur lui-même se réveille, puis traverse sa
chambre pour rejoindre un écran de cinéma. Le cinéma est tout pour Carax, et il s'y livre tout entier à travers Denis Lavant, qui réalise par ses multiples transformations la plus impressionnante performance d'acteur vue depuis bien longtemps. « Holy motors » ne fait pas non plus exclusivement référence au cinéma, au détail près que la réalité est cinéma selon Carax. On y retrouve quelques thèmes actuels (la finance, la fracture sociale, la crise, le voile (!)) mais c'est surtout un film vertigineux sur l'identité. Rien n'y est sûr, sinon qu'il continuer à enchaîner les rendez-vous. Après un long sommeil forcé, Carax
est de retour !
On retiendra…
Les idées ahurissantes d'inventivité du
réalisateur, que ce soit au niveau du scénario comme de la mise en scène, les
transformations de Denis Lavant, l’intense émotion qui parcourt le film.
On oubliera…
C’est le genre de films qui me
fait regretter d’avoir créé cette rubrique dans mes critiques.
« Holy motors » de
Leos Carax, avec Denis Lavant, Denis Lavant, Denis Lavant, Denis Lavant, Denis
Lavant, Denis Lavant, Denis Lavant, Denis Lavant, Denis Lavant, Denis Lavant,
Denis Lavant, Edith Scob, Eva Mendes, Kylie Minogue,…
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