mardi 30 juin 2015

Cruelles fables (Le conte des contes)

« Cendrillon », « Promenons-nous dans les bois », « La belle et la bête » : les contes ont la cote dans les salles obscures. Après les grosses productions Disney et la tentative de résurrection d’un cinéma populaire fantastique français, Matteo Garrone propose  « Tale of tales », une production ambitieuse italo-française, mais comme son titre l’indique, tournée en anglais avec un casting international. Lui qui avait remporté avec ces deux derniers films le Grand Prix du jury (« Gomorra » en 2008 et « Reality » en 2012), il est reparti cette année bredouille de Cannes. Une absence au palmarès logique tant le film est classique dans sa forme et son propos. Mais qu’on ne s’y trompe pas, ce classicisme n’a rien d’agaçant, ni même de négatif. « Tale of tales » est loin d’être insignifiant, car il dispense un plaisir très simple de conteur d’histoires. Une rareté en sélection officielle à Cannes.


Enchanteur et forain
Matteo Garrone déploie dans ce film une mise en scène élégante au service d’un récit entremêlant trois contes aux multiples rebondissements. Le plaisir que procure la projection du film tient autant à cette mise en scène qu’à l’art avec lequel ce récit est construit. Usant d’archétypes, le scénario fait avancer sans s’appesantir ses trois fils principaux, avec une économie de dialogues étonnante qui apporte une belle épure au film. Quant au montage alterné qui saute d’un conte,  il donne un intérêt feuilletonesque, qui ne faiblit pas car sans cessé relancé.
L’élégance de la mise en scène frappe d’abord par la direction artistique, remarquable. Les décors, notamment, sont fabuleux. Garrone s’inspire et rend hommage au cinéma de Méliès, à l’origine foraine du cinéma. L’usage du numérique est très modéré. Le film veille à garder un aspect artisanal, au charme enchanteur. Il réussit ainsi à renouer avec un merveilleux associé aux débuts du cinéma, et qui sied si bien aux contes. La musique, très présente et très belle, est signée par Alexandre Desplat. C’est elle-aussi une merveille.
Les surprises du casting concourent aussi au plaisir du film, de l’apparition de Vincent Cassel aux lubies de Toby Jones. « Le conte des contes » se distingue enfin des autres films du genre par sa cruauté souvent très drôle. Ces contes se moquent tous des travers humains, avec un humour presque noir qui font de « Tale of tales » une tragi-comédie belle et désespérée sur la condition humaine.

On retiendra…
Une esthétique et une élégance donne un charme merveilleux à ce film très cruel.

On retiendra…
Garrone vise au classicisme, réactive un émerveillement, mais n’invente rien.


« Tale of tales » de Matteo Garrone, avec Salma Hayek, Vincent Cassel, Toby Jones,… 

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