On n’osait
plus y croire. Le grotesque « Alice au pays des merveilles », le
calamiteux « Dark shadows », l’anodin « Frankenweenie », et
le passable « Big eyes » semblaient autant de preuves du déclin du
cinéma de Tim Burton, amorcé depuis son remake de « La planète des
singes » en 2001. Le plaisir éprouvé devant « Miss Peregrine et les
enfants particuliers » (on croirait le titre d’un film de Jean-Pierre Jeunet)
est donc double : celui de voir un bon film, et celui de retrouver un
cinéaste aimé que l’on croyait perdu.
L’inspiration retrouvée
« Miss
Peregrine et les enfants particuliers » est l’adaptation d’un roman
jeunesse éponyme de Ransom Riggs. Cette histoire semble pourtant tout droit
sortie de l’imagination de Tim Burton, tant elle rassemble, quasi
exhaustivement, les thèmes chers au cinéaste (l’enfance, l’inadaptation, le
rêve…). A une nouveauté près : le jeu sur le temps, encore inédit dans son
cinéma. Les enfants du titre sont forcés, pour survivre, de revivre
éternellement la même journée de 1943, ce qu’ils appellent une
« boucle ». Le film déploie à la suite ce concept de boucle tout un
univers de « particularités », d’ « ombrunes » et de
« sépulcreux » d’une richesse insoupçonnée et complètement
burtonienne (au cœur de l’intrigue, une affaire d’yeux…).
Le
réalisateur multiplie les fantaisies visuelles : visions frappantes et
poétiques se succèdent sans s’essouffler – et dans une 3D très bien utilisée. On
pourrait les énumérer, mais elles sont si nombreuses qu’on se contentera de les
résumer en disant que c’est beau, drôle, et de plus en plus chargé de sens. Impossible
cependant de ne pas citer le visage hallucinant de Samuel L. Jackson, qui tient
ici un de ses meilleurs rôles de méchant (lui qui en joue tant). Il réussit à
la fois à être des plus effrayants et hilarants.
Dans cette
fête de l’inspiration retrouvée, Burton s’amuse à glisser des références un peu
partout (et à se glisser lui-même dans le film via un caméo furtif, une
première !), de « Jason et les argonautes » jusqu’à « Dumbo »,
son prochain film (on craint le pire). A ce jeu des citations, on notera la
bizarre convergence des formes entre « Miss Peregrine… » et « Ma
loute », le film de Burton reprenant sans le faire exprès quelques-unes des
images fortes du film de Dumont (un personnage lévitant sur une plage du nord).
Une simple coïncidence, mais amusante… surtout pour Dumont !
Systématique numérique
Pour
autant, on retrouve aussi dans « Miss Peregrine et les enfants
particuliers » quelques-uns des défauts de Burton : il ne s’attarde
pas assez sur certains thèmes de son histoire – le traitement des boucles
temporelles pouvait par exemple mériter beaucoup mieux. Malgré une séquence
marrante et de mauvais goût réalisée en stop motion, le recours trop récurrent
au numérique fait regretter la folle poésie des effets spéciaux employés par le
cinéaste avant 2000…
S’il ne
constitue pas le chef-d’œuvre du cinéaste, « Miss Peregrine et les enfants
particuliers » est sans conteste l’un de ses meilleurs films, et redonne
espoir pour la suite de sa filmographie.
On retiendra…
Burton est de retour et
convoque ses thèmes fétiches dans une intrigue d’une grande richesse, pleines
de visions poétiques.
On oubliera…
Le film n’exploite pas
jusqu’au bout la richesse de son scénario. Le numérique est trop privilégié par
rapport aux effets traditionnels tellement plus poétiques.
« Miss Peregrine et les
enfants particuliers » de Tim Burton, avec Asa Butterfield, Eva Green,…
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